Cet article relate les échanges d’Arts(,) dēco & design avec Noē Schmidt. Il nous y présente son univers créatif et singulier en tant qu’artiste pluridisciplinaire passionné de peinture, sculpture et photographie argentique. Inspiré par le surréalisme, la nature et le recyclage, il puise dans des matériaux délaissés pour leur donner une nouvelle vie, créant des œuvres à la fois poétiques et philosophiques. Sa pratique artistique est marquée par une recherche constante de mouvement et de connexion, exprimant les liens entre l’Homme et son environnement.
Noé se distingue par son approche intuitive, mêlant influences impressionnistes et surréalistes à une réflexion personnelle profonde. À travers ses sculptures et assemblages, il révèle un monde où textures et matières racontent des histoires. Découvrez son parcours atypique, ses inspirations et ses projets, empreints d’une énergie créative hors du commun.
Bonjour Noé ! Pour commencer, peux-tu te présenter un peu ? Me dire ce qui te caractérise, ce que tu aimes faire, depuis quand ta sensibilité artistique s’est éveillée, etc. ?
N : Bonjour, je suis Noé Schmidt. Je dirais que je suis un artiste pluridisciplinaire, pratiquant l’art visuel et plus spécifiquement la peinture, la sculpture, la photographie argentique (avec parcimonie). Que dire ? J’aime bricoler, recycler, mais je ne sais pas vraiment expliquer pourquoi. Je ne le fais pas vraiment par engagement mais vraiment parce que j’aime fouiller et récupérer des choses que les autres ne veulent plus. Mes trouvailles me permettent de créer par impulsions, surtout des sculptures. Je me sers également d’objets naturels pour sculpter.
En règle générale, je cherche à exprimer la connexion entre l’Homme et la nature. Pour décrire mon travail, je dirai qu’il y a une petite touche d’onirisme, qui se réfère souvent à des sujets philosophiques. Parfois, je peux simplement exprimer certains ressentis comme le soleil qui chauffe la peau comme une caresse.
Bref, ce que j’aime faire le plus, c’est bricoler et créer.
Ma sensibilité artistique a toujours été là, je crois. Depuis que je suis tout petit, j’imagine des constructions. Mais j’ai l’impression qu’avec le temps, cette sensibilité s’amenuise.
Quel est ton parcours scolaire / ta formation ?
N : J’ai un parcours scolaire plutôt basique. J’ai obtenu un bac STI2D — qui n’a rien à voir avec l’art — après lequel j’ai fait une MANAA (Mise à niveau en arts appliqués) sur Bordeaux. C’est au sein ans cette dernière formation que j’ai découvert qu’on pouvait faire de l’art son métier et j’ai tout simplement adoré. Bachelor Illustration 1 an. Plus envie de continuer, arrêt prématuré des 3 années de bachelor.
Comment est-ce que tu te définis ?
N : Un vagabond je dirais. Je ne sais pas trop où aller, je ne sais pas ce que je fais… Je change souvent de modèles artistiques, de médiums, d’habitudes, je passe de la rue aux tableaux, des sculptures aux peintures en passant par la photo et les mises en scène que cela peut demander.
Quels artistes, ou quels courants artistiques, ont particulièrement marqué ta pratique ?
N : Quand j’ai commencé à m’intéresser plus sagement à la peinture, j’ai été attiré par les impressionnistes. Je trouvais leur histoire particulièrement intéressante et notamment leur capacité à peindre avec acharnement, j’étais très admiratif de cette faculté qui m’inspirait beaucoup.
Par la suite, je me suis plus intéressé au surréalisme. J’y ai trouvé des choses à exprimer de façon plus précise. Ce mouvement véhicule des idées philosophiques et intellectuelles qui m’attirait, au-delà de l’acte même de peindre. Même peindre je trouve aujourd’hui que c’est moins kiffant/stimulant. Je préfère réfléchir, imaginer à une scène, qui fait sens dans mon esprit et qui est plus dure à retranscrire sur toile. Je suis moins passionné à l’idée de peindre. Peut-être que mes pratiques changeront, mais je dois reconnaître que la peinture ne me suffit plus pour exprimer mon imaginaire. En tous les cas, les surréalistes véhiculent une idéologie intellectuelle qui me fascine encore à ce jour.
Pour citer quelques artistes et inspirations, il y a Odd Nerdrum qui a un style que j’adore et qui se rapproche du surréalisme. Ensuite, je pense à František Kupka : un homme qui fait absolument tout, l’un des précurseurs de l’abstraction.
Sinon, je me laisse inspirer par tout ce qui m’entoure, une scène marquante que je vais essayer de traduire “à ma sauce”, un livre, des idées philosophiques…
Est-ce que tu t’attaches à un (ou plusieurs) style(s) en particulier pour créer ?
N : J’ai des styles assez différents pour chacune des pratiques auxquelles je m’adonne. Pour la peinture, j’aime me rapprocher du surréalisme. Mais paradoxalement, le surréalisme demande une façon de faire assez réaliste ou en tout cas des compétences, des capacités académiques d’un point de vue pratique. Et j’aime aussi pouvoir m’en détacher pour pouvoir créer de manière plus abstraite, plus graphique ou colorée.
Pour la sculpture, je ne saurai pas qualifier mon style. Je n’en ai aucune idée. Je pense que je me réfère un peu à l’art brut mais sans pouvoir l’affirmer parce que j’ai suivi des formations d’art et ça ne colle pas avec l’essence de l’art brut. Ceci dit, c’est vraiment une production d’œuvres qui m’intéresse beaucoup en sculpture mais aussi en peinture. Je pense de plus en plus à travailler sur quelque chose qui s’y apparenterait tout en liant sculpture, peinture et textures.
Quels médiums préfères-tu utiliser ?
N : Franchement, je commence à aimer de plus en plus les médiums pour la sculpture. Je me détache de plus en plus de la peinture — bien que j’aime encore ça. Mais je tends à me donner à 100% à la sculpture, au bricolage, au recyclage, à l’assemblage de différents matériaux et textures.
Au sein des diverses pratiques artistiques auxquelles tu t’adonnes, est-ce qu’il y a un élément transversal qui se retrouve dans ta pratique de chacun de ces médiums ? Qu’est-ce qui guide ta créativité finalement ?
N : Je pense que c’est l’anatomie et le vivant. Quelque chose m’a marqué dans l’élaboration de ma culture artistique, c’est le Codex (Codex Atlanticus) de Léonard de Vinci. J’ai trouvé ça incroyable comme travail, mais surtout la dissection des membres pour comprendre le fonctionnement du corps, surtout à cette époque. Donc je dirai que cette admiration pour le Codex guide encore transversalement mes différentes productions.
Je suis marqué aussi par les oiseaux. C’est un élément qu’on retrouve beaucoup dans mon travail, ainsi que tout ce qui s’y rattache (les plumes, les choses qui volent, etc.). Les mains également, je les trouve intéressantes !
Tu sembles exceller dans le dessin anatomique et le modèle vivant, le réalisme je dirai même, mais cela fait longtemps que tu n’en as pas fait. Est-ce que quelque chose te déplaît là-dedans ?
N : J’ai appris en école l’anatomie, le modèle vivant, les structures, l’architecture, le dessin académique en tout genre. Du coup, je le pratique encore un petit peu, mais j’essaie de plus en plus de m’en détacher en en conservant seulement les bases. J’essaie d’appréhender de nouvelles pratiques et esthétiques, mais aussi de nouvelles colorimétries peut-être moins naturelles et plus abstraites, des perspectives graphistes nouvelles aussi. C’est pour ça que je mets en lien Kupka, parce que c’était vrmt son schéma artistique. Il a commencé par de l’académisme avant d’être pionnier de l’abstraction en s’y émancipant véritablement. Et je trouve ça particulièrement inspirant.
Après ce qui me déplaît un peu dans la peinture c’est que j’y ressens un manque de mouvement. J’y suis statique. C’est l’intellect qui prend le dessus sur l’acte créatif en lui-même, pour la mise en forme de la composition, la représentation à plat. C’est très compliqué et ça demande une grande réflexion à mon sens surtout sur du 2D. Alors qu’en sculpture, j’ai l’impression de trouver plus de mobilité. Je préfère bouger autour de ma pièce, construire, bricoler. C’est plus instinctif pour moi.
Depuis quelque temps, tu sculptes et assemble des éléments avec une certaine influence exotique. Qu’est-ce que tu aimes dans le fait de sculpter, d’assembler ? Qu’est-ce qui t’anime dans ces influences-là ?
N : C’est vrai qu’il y a une influence exotique évidente dans mes sculptures. Je ne sais pas si elles ont un lien direct avec les origines malgaches de ma mère. Mais j’aime ce côté un peu primitif lié à l’exotisme, je trouve que les formes y sont plus instinctives. Et puis je trouve que ce style-là apporte plus de caractère. Par exemple, je peux produire des œuvres sans les genrer forcément. Je crée des bouches, un nez, des yeux, de manière intuitive. et je me retrouve avec des visages plus abstraits et j’aime qu’on ne puisse pas définir la personne ainsi représentée.
Dans la peinture, il y a moins de choses à lier donc je trouve que la pratique est assez redondante. Tant dis que dans la sculpture permet de nombreux alliages (bois, métal, plâtre, argile, etc.), et nécessite un savoir-faire et une technique spécifiques pour chacun d’entre eux. Toutes ces matières-là peuvent se combiner, se marier pour former un tout. Je trouve que c’est idéal pour construire et concevoir. Il y a tellement de choses à y apprendre.
Quel a été le plus beau moment que tu as connu grâce à ta pratique artistique ?
N : Je pense que c’était ma première expo personnelle. C’était juste incroyable. Avant ça, j’ai travaillé “dans l’ombre” durant 5 ans. Il m’est arrivé de montrer quelques-unes de mes toiles à l’occasion dans de petites expositions, mais jamais plus de 4 ou 5 à la fois. Je n’avais jamais montré l’ensemble de ma production. Et cette première expo qui m’a été dédiée m’a permis de dévoiler tout ce que j’avais pu faire depuis mes débuts à mon dernier tableau. C’était vraiment génial de pouvoir montrer tout ça à un public et surtout à ma famille qui s’est déplacée pour la première fois pour voir mon travail dans une expo. Ressentir leur soutien m’a fait beaucoup de bien. On a pu faire une inauguration, une soirée, c’était super. Et j’ai dû gérer la galerie durant une semaine, c’était aussi une belle expérience. Ça m’a permis de faire plein de belles rencontres (José, qui passait tous les jours, avec lequel j’ai eu un super feeling !).
As-tu un projet à venir dont tu aimerais me parler ?
N : Je travaille sur une production assez grande grâce à un sommier de lit que j’ai récupéré. Je suis en train d’en faire une toile gigantesque sur laquelle je veux associer sculpture et peinture. Je pense y mettre divers matériaux tels que des plumes, de la paille, du plâtre, du fer, de l’argile, des tissus…
À venir, il y a aussi une nouvelle exposition à laquelle je vais participer. Ce sera au sein de l’Espace Moon, dans les Halles des Citernes à côté de la gare de Bordeaux. L’espace en question a été créé par Robin Gaudillat, un jeune artiste bordelais. Je lui ai envoyé mon portfolio et il m’a proposé de bosser sur un projet d’exposition pour janvier 2025. Je prépare ça donc en créant de nouvelles toiles et sculptures !
Je pense aussi à des projets d’installations urbaines, j’en avais déjà fait sur Toulouse. J’ai les idées mais je n’ai pas encore le matériel.
Qu’est-ce que je peux te souhaiter pour la suite ?
N : Enfin, LE projet ultime que j’ai en tête pour ma vie (en fait c’est ce que je me souhaite), c’est d’avoir un terrain et de pouvoir l’exploiter à 100% pour créer tout un univers qui me ressemble. J’aimerai l’ouvrir au public, que ce soit un lieu de partage. Un peu à la façon des Vivres de l’Art ! Mais dans mon style et dans mon genre. Tout construit, évidemment de mes mains, même ma maison.
Quel conseil donnerais-tu à quelqu’un qui rêve de vivre de son art ?
N : Je donnerai le conseil de ne pas se juger et de ne pas prendre en compte le jugement des autres qui peut devenir un véritable frein. Mais j’insiste sur le fait de ne pas se juger : il ne faut pas trop y consacrer de temps, il faut juste faire, penser c’est bien mais faire c’est mieux.
Cite 3 artistes “émergent.e.s” que tu suis de près en ce moment…
N : Remedios Varo, Léonora Carrington et Alessandro Sicioldr.
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