Dans cette entrevue, Louis Bressolles, designer toulousain originaire d’Arcachon nous partage son parcours. Évoquant une enfance bercée par la mer et la créativité, il explique comment ses études en arts l’ont conduit à développer un style unique, alliant esthétique organique et dimensions thérapeutiques.
Son processus de création est profondément ancré dans ses émotions, et chaque pièce qu’il conçoit reflète ses sensations et son vécu. Membre du Collectif Zig-Zag, il valorise une approche éthique et durable du design en utilisant des matériaux recyclés. Louis se projette vers un avenir où il souhaite collaborer avec des professionnels de la santé mentale pour explorer davantage le design thérapeutique. Découvrez son univers riche et engagé, dans lequel la création devient un véritable acte cathartique.
Bonjour Louis ! Tu es un designer toulousain. Mais, d’où viens-tu ? Qu’aimes-tu ? Finalement… Qui es-tu, en quelques mots ?
L : Je m’appelle Louis Bressolles, je viens d’Arcachon et j’exerce en tant que designer à Toulouse. Quand j’étais enfant, je passais des journées entières, au bord de l’eau, à construire des châteaux de sable puis les protéger de la marée. Sans oublier tous les trésors de coquillages que j’ai enfouis sous le sable de la Dune du Pilat. Entre piraterie et chasse aux trésors, mon enfance fut nourrie d’histoires fantastiques forgeant par la suite, mon imaginaire et ma créativité.
Crab lamp, 2024
Crab lamp, détail, 2024
Comment en es-tu arrivé à devenir designer (parcours scolaire, pro…) ?
L : C’est pour cela que, guidé par cet imaginaire, j’ai choisi de réaliser des études d’arts. En obtenant un Bac, science technique des arts appliqués à Dax, j’ai pu découvrir le métier de Designer d’objet. Je me suis ensuite spécialisé en Design d’objet avec un BTS, à la cité scolaire Raymond Loewy, à la Souterraine, en option éco-conception.
Puis, j’ai finalisé avec un Diplôme Supérieur d’Arts Appliqués, option pluridisciplinaire dans l’établissement Bréquigny, à Rennes. Après mes études, j’ai travaillé pour Leo Orta dans son atelier Les Moulins puis j’ai travaillé comme designer dans le Fablab La Place en Ariège. Il y a bientôt 3 ans que j’ai rejoint le Tiers-lieu Fablab EcoDesignerie au sein de la cité scolaire Rive Gauche à Toulouse pour exercer le métier d’assistant Designer éducatif et pédagogique.
Aujourd’hui, j’exerce à mon compte comme designer d’objet et comme designer pédagogique : une pratique qui s’apparente à du “design thérapeutique”.
Dans ce parcours, quelles influences (œuvres, artistes, mouvements, ou autre) continuent de marquer tes créations ?
L : Leo Orta reste pour moi une référence au même titre que Gaetano Pesce. Néanmoins, ils n’influencent pas mon travail, car m’identifier à d’autres ne m’intéresse pas. Ce qui m’inspire c’est le quotidien, les rencontres, les liens sociaux, la nature, les sons, les mouvements du corps, les attitudes, l’humain, les animaux, etc. Je suis attentif aux choses qui m’entourent et je tente de retranscrire le ressenti, les sensations et/ou les émotions qui s’en dégagent.
Comment décrirais-tu ton style ?
L : Avant tout, je crée pour extérioriser puis matérialiser des sensations, émotions, trauma, désirs… afin de ne plus être parasité par celles-ci. Il s’agit donc d’une sublimation cathartique de mon état émotionnel mis à disposition d’une activité professionnelle. Par conséquent, je dirais que mon processus de création a des intentions thérapeutiques. Créer me permet de me sentir bien. À mi-chemin entre anamorphiques et organiques, l’esthétique et la forme de ces objets cathartiques varient en fonction de la psyché abordée, leur offrant une certaine vivacité.
Luciole walking lamp, 2021
Mirror chair, 2024
Sternum shelf, 2024
Quelle est la pièce dont tu es le plus fier ?
L : Grue, car sa fabrication fut un véritable casse-tête. Je n’ai tiré aucun plaisir lors de sa création néanmoins le résultat symbolise pour moi la persévérance et la rigueur. C’est également la pièce qui m’a coûté le plus cher, car pour la fabriquer, j’ai dû sous-traiter à un artisan verrier et à un artisan métallier.
Armchair Grue, 2024
Armchair Grue, détail, 2024
Quelles sont les difficultés les plus courantes que tu rencontres en tant que designer toulousain ?
L : Ma principale difficulté est d’ordre logistique, à savoir le transport et le stockage des pièces.
Tu sembles participer à des événements et des expos. En quoi cela est-il important pour toi ? Quels sont les prochains événements où on pourra te retrouver ?
L : Les expositions sont essentielles pour la mise en valeur et la présentation de mon travail. Tout d’abord d’un point de vue commercial mais également relationnel. Ce mois de septembre, j’exposais à l’événement Village Palace à l’occasion de Paris Design Week, puis à l’événement Pratique en Zigzag à l’occasion de France Design Week. Pour sûr, vous pouvez me retrouver l’année prochaine à la Paris et France Design Week. Entretemps, quelques événements sont en réflexion…
Tu fais partie d’un collectif d’artistes, le Collectif Zig-Zag. Peux-tu nous dire quelques mots à son sujet ?
L : Zigzag est un collectif qui rassemble 10 designers, artistes et artisans dispersés partout en France. Chacun avec sa pratique et sa singularité souhaite valoriser un processus de fabrication éthique et responsable. Trois fois par an, nous nous retrouvons pour mixer nos pratiques lors d’expositions, de conférences et de résidences. Ce collectif nous permet de stimuler nos pratiques et de susciter des questionnements sociaux, professionnels, économiques liés à nos pratiques et à notre époque.
Au sein du collectif, les artistes apportent un intérêt particulier à la dimension durable des créations. Comment parviens-tu à appliquer cette responsabilité environnementale dans ton travail ?
L : Il faut savoir que, dans mon procédé de fabrication, je n’emploie que des matériaux récoltés. Par conséquent, ces déchets conditionnent l’échelle de la production et le procédé de mise en œuvre. C’est pourquoi chaque pièce est unique. De plus, je ne transforme pas ces matériaux récoltés, mais plutôt je souligne leur vécu par la mise en avant de leurs propriétés esthétiques. Je cherche à sublimer l’histoire (origines et vécu) du déchet afin d’offrir une valeur ajoutée à l’objet produit pour sensibiliser l’usager.
L’histoire de l’art contemporain occidental a hérité de capitales artistiques, qu’on a longtemps assimilé à Paris et à New-York. Le collectif Zig-Zag tend à élargir (géographiquement) le réseau culturel du design. Peux-tu nous en dire plus à propos de ces enjeux ?
L : Je n’ai pas d’avis sur la question néanmoins ce que je peux en dire, c’est qu’en fonction de chaque territoire, on rencontre des matériaux, des ambiances et des cultures différentes. Certains sont intimement liés à celles-ci. Par exemple, ayant passé toute mon enfance à Arcachon, je reste un gamin des plages sensible au goût salé des vagues et au sable dans les chaussures…
Je suis également sensible aux matériaux, ethnies et formes du bord de mer tels que les coquillages, les cordes et filets de pêche. Je ne peux nier que le commerce est plus important à Paris ou New York, c’est pourquoi j’envoie mes pièces aux Etats-Unis. Néanmoins, l’inspiration et la création sont là où tu veux, ou tu te sens bien.
Comment imagines-tu l’évolution de ton travail dans les prochaines années, notamment celle de ton design thérapeutique ?
L : Justement, j’imagine me rapprocher de ma famille en délocalisant mon atelier vers Bordeaux. J’imagine explorer davantage mon travail artistique de sublimation psychique en collaborant avec des psychanalystes et psychologues afin d’organiser des ateliers collectifs de design thérapeutique.
Quel conseil donnerais-tu à quelqu’un qui souhaite se lancer dans une carrière artistique ?
L : Il est plus facile de faire puis parfaire que d’attendre l’idée parfaite alors ose et va jusqu’au bout de tes idées ! N’écoute pas les autres, crois en toi !
Cite 3 artistes que tu suis de près en ce moment…
L : Alors de près, je suis le travail de Thibault Philip, Teun Zwets et Serban Ionescu.
Pour en découvrir davantage sur le travail de Louis, rendez-vous sur son compte Instagram.
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